La procédure devant le juge administratif
La procédure est essentiellement écrite
L’échange d’arguments se fait essentiellement par des écrits : les mémoires. Le véritable débat se déroule ainsi avant l’audience lors de l’instruction du dossier. Par conséquent, il ne faut pas attendre l’audience pour présenter des demandes, produire des pièces ou développer des arguments. Pour autant, le requérant ou son avocat peut toujours s’exprimer pendant l’audience s’il veut insister sur certains points de son argumentation.
La procédure est contradictoire
Le tribunal recueille les arguments de toutes les personnes concernées par le litige et leur communique ceux des autres parties. Chacune des parties est ainsi en mesure de discuter l’énoncé des faits et les moyens juridiques que ses adversaires lui opposent.
Outre le requérant et le défendeur, qui est le plus souvent l’administration dont l’acte est contesté, une action en justice peut impliquer des tiers concernés par l’issue du litige (par exemple le bénéficiaire d’un permis de construire lorsqu’il est contesté par des voisins).
La procédure est inquisitoriale
Le juge organise et dirige l’instruction. Il peut demander aux parties des éclaircissements sur des points particuliers ou la production de pièces complémentaires.
Le déroulement de l'instruction
L’instruction commence dès que le greffe a enregistré la requête. Le président de la juridiction désigne un rapporteur. C’est le magistrat qui suit l’instruction et étudie l’affaire.
Lorsque l'instruction se déroule normalement :
La requête et ses annexes sont transmises au défendeur ainsi qu’aux autres personnes éventuellement concernées. Le juge fixe un délai pendant lequel chacun peut présenter ses observations.
Le greffe communique ensuite au requérant le mémoire en défense (les arguments du défendeur).
Les mémoires présentés ensuite ne sont communiqués à la partie adverse que s’ils contiennent des éléments nouveaux.
Devant les tribunaux administratifs et les cours administratives d’appel, les parties peuvent envoyer leurs écrits jusqu’à la date fixée par l’ordonnance de clôture de l’instruction ou, en l’absence d’une telle ordonnance, jusqu’à trois jours avant l’audience publique. Pour une audience dont la date est fixée le mardi, par exemple, les mémoires peuvent être enregistrés jusqu’au soir du vendredi précédent.
Au Conseil d’État, l’instruction n’est close qu’au jour de l’audience, soit après que les avocats ont formulé leurs observations, soit, en l’absence d’avocat, après appel de l’affaire à l’audience.
Le président de la chambre chargée de l’instruction peut toutefois fixer par ordonnance une date à partir de laquelle l’instruction sera close.
Cependant, devant toutes les juridictions et pour permettre aux magistrats de prendre en compte ces éléments nouveaux, il convient de ne pas attendre la clôture d’instruction pour faire valoir des arguments : cela n’aboutirait qu’à retarder encore le jugement de l’affaire.
Une fois les premiers mémoires échangés, le rapporteur étudie l’affaire et prépare un projet de jugement. Le dossier est ensuite transmis au rapporteur public. Ce magistrat est chargé de présenter des conclusions orales lors de l’audience publique, exprimant en toute indépendance son opinion sur la solution qu’il recommande pour le litige.
le tribunal peut lui adresser une mise en demeure de produire un mémoire. Une mise en demeure restée sans réponse vaut acquiescement aux faits de la part de la partie restée silencieuse.
Dans certains cas, la requête appelle une solution certaine :
Le président peut décider qu’il n’y a pas lieu de mener une instruction. L’affaire pourra alors être directement inscrite à une séance de jugement ou, le cas échéant, être traitée par ordonnance sans audience.
L’affaire peut être jugée sans instruction et sans audience :
Si le requérant se désiste : il renonce à poursuivre la procédure.
Si pour des raisons diverses il n’est plus nécessaire de statuer (par exemple, lorsque l’administration a donné satisfaction au requérant).
Si la requête est irrecevable.
Ou si la requête manque d’arguments juridiques (moyens sans rapport avec le litige ou non assortis de précisions suffisantes notamment).
La séance publique
Selon les matières et l’importance de l’affaire à juger, le nombre de magistrats siégeant dans la formation de jugement varie. Il est toujours impair. Habituellement, la formation de jugement se compose d’un président, du magistrat rapporteur et d’un autre magistrat. Certaines affaires sont jugées par un magistrat statuant seul.
Lorsque l’affaire est appelée, le rapporteur rappelle le contenu de la demande et les échanges de mémoires.
Puis le rapporteur public prononce ses conclusions.
Le rapporteur public ne fait pas partie de la formation de jugement, n’assiste pas au délibéré et ne participe pas à la décision. Cependant, devant le Conseil d’État, il peut assister au délibéré, sauf demande contraire expresse des parties, mais il n’y prend pas la parole et ne participe pas au vote.
Après avoir exposé les faits du litige et l’ensemble des arguments échangés entre les parties, il propose en toute indépendance la solution de droit qui lui paraît la plus appropriée. La formation de jugement n’est pas obligée de suivre son avis.
Certaines affaires sont dispensées de conclusions du rapporteur public en raison de l’urgence de la procédure (référés, éloignement des étrangers faisant l’objet d’une mesure de surveillance, mesures d’injonction en matière de droit au logement). Le président de la formation de jugement peut également, sur proposition du rapporteur public, et à l’intérieur d’une liste limitative de matières, dispenser celui-ci dans certaines affaires qui ne présentent pas de difficulté juridique particulière (notamment en matière de contentieux sociaux et de contentieux des permis de conduire).
Ensuite, le président demande aux parties ou à leurs mandataires s’ils ont des observations à formuler.
Compte tenu du caractère écrit de la procédure —hors procédures d’urgence —, les parties ne peuvent présenter que de brèves observations sans développer de nouveaux arguments.
Au cours des procédures d’urgence, les parties peuvent présenter leurs observations orales et produire des documents nouveaux à l’audience. La clôture de l’instruction intervient alors généralement à l’issue de l’audience.
Dans les procédures de cassation devant le Conseil d’État, seuls les avocats au Conseil d’État et à la Cour de Cassation s’expriment au cours de l’audience.
Les requérants ne sont donc pas autorisés à intervenir oralement.
À l’issue de l’audience, l’affaire est mise en délibéré. La décision est notifiée quelques temps après l’audience. Le président de la formation de jugement veille au bon ordre de l’audience. Les personnes qui y assistent doivent observer une attitude digne et respectueuse. Il leur est interdit de parler sans y avoir été invitées, de donner des signes d’approbation ou de désapprobation ou de causer quelque désordre que ce soit. Le président peut faire expulser toute personne qui n’obtempère pas, sans préjudice des poursuites pénales ou disciplinaires qui pourraient être exercées contre elle.
> plus d'information sur le site de Legifrance
Assister à l'audience
Sauf huis-clos décidé par le président de la formation de jugement pour des raisons de sécurité ou de protection de l’intimité des personnes, les audiences sont publiques.
Les parties et leurs mandataires sont avertis de la date de l’audience, mais leur présence n’y est pas obligatoire. L’audience peut donc se tenir même sans la présence des parties ou de leurs mandataires.
La présence des parties est fortement recommandée pour les procédures d’urgence en raison du caractère largement oral de la procédure contradictoire.
Le jugement
Au terme de l’audience, l’affaire est mise en délibéré. Les parties sont invitées à quitter la salle et la séance publique s’achève.
Les magistrats se retirent et se réunissent pour adopter une décision. La solution retenue est celle qui a recueilli l’approbation de la majorité des magistrats.
Le sens de la décision est rendu public au bout d’un délai de quinze jours environ. La décision de justice est notifiée aux parties dans les meilleurs délais, par les applications Télérecours et Télérecours citoyens ou par voie postale pour les parties qui ne sont pas inscrites dans ces applications.
La lettre de notification du jugement ou de l’arrêt indique les délais et voies de recours éventuels contre celui-ci.
Les tribunaux administratifs rendent des « jugements », les cours administratives d’appel, des « arrêts », et le Conseil d’Etat, des « décisions ».
A noter
Les tribunaux administratifs rendent des « jugements », les cours administratives d’appel, des « arrêts », et le Conseil d’Etat, des « décisions ».